Je voudrais une ville où les quartiers seraient comme autant de villages… où dehors on aurait des jardins où des tables attendraient sous de vieilles tonnelles…
Quelle impression bizarre de balayer des yeux des lieux dont la mémoire en nous existe mais se dissout devant les changements…
Étrange sensation… Et la raison vacille …
C’était pourtant ici qu’enfant, dans ce jardin, je jouais, sautais à cloche pied ou passais sous les bancs…
C’était pourtant ici que de grands arbres en fleurs me griffaient de leurs branches quand, poursuivie par mes cousins faux monstres, je m’enfuyais hurlante, excitée du plaisir de la peur…
C’était pourtant ici au fond de cette cour, entre ces maisons basses, intriquées en village, que s’ouvrait cet espace offert aux scénarii de nos rêves d’enfants…
C’était pourtant ici, en face, que s’ouvrait un domaine grand comme une prairie, touffu comme les forêts, plat comme un désert, haut comme les montagnes, labouré de chemins que nous seuls pouvions voir, véritable univers livré à nos jeux les plus extravagants…
C’était pourtant ici… vous avez tout détruit. Vous avez recouvert de béton, comme un grand sarcophage. Vous avez volé mon passé, vous avez rasé ma maison, enseveli les arbres qui avaient grandi avec moi…arraché les bancs, éventré mes rues…
Quelle impression bizarre de balayer des yeux des lieux dont la mémoire en nous existe mais se dissout devant les changements…
Je voudrais une ville où les quartiers seraient comme autant de villages… où dehors on aurait des jardins où des tables attendraient sous de vieilles tonnelles…
NC printemps 04